Le 19 septembre dernier se tenait devant la Maison de l’architecture de Normandie une initiative singulière proposant des réflexions autour de la place de Parking et de son appropriation. Pour l’anecdote, le chantier Mabon tire son nom d’une ancienne fête païenne d’origine celtique visant à célébrer l’équinoxe d’automne durant la période des récoltes précédant l’hiver. De nombreuses activités ont donc été organisées autour de cette thématique ; notamment la conception de bocaux pour l’hiver (ratatouille, coulis de tomate, confitures…) ainsi qu’un repas à partager avec les organisateurs et les habitants du quartier.
Assez peu coutumiers de voir cette rue animée, les Rouennais sont venus échanger sur les initiatives à mettre en place pour une ville plus proche des désirs de ceux qui la vivent. En parallèle se tenait la clôture de l’exposition Réenchanter le monde, prolongée jusqu’au 19 septembre, qui offrait également quelques belles pistes de réflexion sur la réappropriation de l’habitat (par ses habitants) à travers le monde.
Rachel Doumerc et Maxime Bricheux sont les deux fondateurs de l’association havraise Terr’O à l’origine de cette journée en partenariat avec Médium Argent, Le Collectif d’En Face, Le Havre de Vers et la MAN. Souhaitant créer un groupe de réflexion autour du territoire et de son appropriation, ils ont recueilli, le temps d’une journée, les souhaits et les envies des habitants. Si le titre de cet article peut ressembler à un mauvais slogan de campagne électorale, le dispositif en lui-même permettait d’interroger la ville contemporaine, essentiellement planifiée autour de l’usage de la voiture individuelle. Que faire sur une place de parking et comment utiliser les espaces publics autrement ?

Chantier Mabon, 19 septembre 2020 – © TERR’O
La parole des interrogés sera restituée du 16 au 18 octobre dans les locaux de Médium Argent. Rachel et Maxime me font toutefois part de leurs premières observations avant l’événement. Sans surprise, et comme bon nombre d’entre nous avons pu le ressentir pendant le confinement, les Rouennais sont désireux de retrouver plus d’espaces verts. « Les gens souhaitent pouvoir planter à côté de chez eux, voir plus de porosité entre la ville et la campagne et remettre le vivant au cœur des réflexions. Il y a également de grosses attentes en ce qui concerne la place du vélo en ville et les infrastructures qui y sont liées. Et puis il y a surtout une volonté de « faire ensemble », de recréer des dynamiques de solidarité, de se réunir autour d’ateliers, de pouvoir faire de la céramique ou de la peinture… de se retrouver en somme. L’espace public doit aussi pouvoir être un lieu de conception et de création. »
Si la pandémie de la Covid-19 a pu accélérer ces tendances pendant le confinement, les grandes métropoles françaises tentent déjà depuis quelques années d’intégrer les problématiques écologiques au sein de leurs politiques publiques. En vient toujours l’éternel débat entre la conception des projets, leur application et l’usage quotidien qu’en feront les usagers. Peut-on encore penser la ville en vase clos, entre décideurs, sans impliquer les citoyens dans la conduite de ces transformations ? Si parfois les programmes politiques ou les propositions des promoteurs intègrent l’idée de co-conception et de participation citoyenne, des décalages subsistent dans l’application de bonnes résolutions qui coïncident trop souvent avec les échéances électorales…
Les propositions de l’association Terr’O, comme il en existe certainement dans de nombreuses autres villes, ont le mérite de renouer avec l’idée simple et démocratique de ce que pourrait être « la politique », du moins localement ; celle de s’organiser autour d’intérêts communs et de concevoir collectivement des espaces par celles et ceux qui les occupent.